Jenna Benchetrit, rédactrice principale chez CBC, a rédigé un article qui m’a fait penser à la génération Z et à la façon dont elle s’inscrit dans l’avenir des collectes de fonds pour les œuvres de bienfaisance.
Il pourrait s’agir du karma. Il pourrait s’agir du retour du balancier après une décennie de mauvaise gestion économique et de graves erreurs de calcul. Mais il s’agit avant tout des signes avant-coureurs d’une possible perturbation générationnelle en matière de philanthropie.
Sous la surface du secteur caritatif du Canada – qui est ébranlé par les augmentations écrasantes du coût de la vie, les dons en déclin et une population toujours vieillissante (baby-boomers) – se trouve une menace existentielle, une menace dont tous les organismes de bienfaisance doivent tenir compte au moment de planifier leur avenir.
Certes, les jeunes ne font pas de dons. Mais il se peut qu’ils ne soient jamais en mesure de le faire.
Bienvenue en 2025, où les promesses de jours meilleurs ont fait place à un marasme économique. La génération Z est confrontée à l’un des marchés de l’emploi les plus difficiles de l’histoire. Selon Statistique Canada, le taux de chômage chez les jeunes Canadiens âgés de 15 à 24 ans est à son point le plus élevé depuis le milieu des années 1990 – une époque où un autre premier ministre libéral, Jean Chrétien, était au pouvoir, où Facebook, Instagram et TikTok n’existaient pas, et où personne ne pouvait imaginer une technologie comme Chat GPT. À l’époque, le terme intelligence artificielle était de l’ordre de la science-fiction.
L’avenir est arrivé – impitoyablement et à toute vitesse. Et il s’accompagne d’une rare convergence de perturbations économiques :
- des politiques inflationnistes mises en œuvre avant la pandémie qui ont été alimentées par des déficits records;
- une instabilité du marché du travail exacerbée par le télétravail imposé par la COVID-19;
- des niveaux d’immigration records jumelés à une pénurie de logements et à un faible marché de l’emploi;
- une récession aggravée par un nouveau président américain déterminé à provoquer une guerre commerciale;
- de nouveaux diplômés qui se sont fait dire d’« apprendre à coder », mais qui sont remplacés par Open AI et des centaines d’autres nouvelles applications logicielles du genre;
- et des variations des taux d’intérêt qui minent la confiance des entreprises, des employeurs et des consommateurs et qui pèsent lourd sur les ménages fortement endettés.
Comme Tricia Williams, du Centre des Compétences futures le dit, « il s’agit en quelque sorte d’un signal d’alarme précoce. » Et le signal est clair : les jeunes Canadiens stagnent à la ligne de départ et font face à une économie qui offre moins d’emplois, des salaires inférieurs et une plus grande incertitude. Jenna Benchetrit cite l’économiste Charles St-Arnaud d’Alberta Central, qui affirme que l’économie canadienne est « anémique », ainsi que Miles Corak, un chercheur canadien aujourd’hui à l’emploi de l’Université de la ville de New York, qui met en garde contre des « séquelles salariales » à long terme avec lesquelles les jeunes qui obtiennent leur diplôme en période de récession doivent composer. Des séquelles qui peuvent durer toute une vie.
La conséquence? Une génération incapable d’accumuler de la richesse, et encore moins d’en faire don.
Comme nous le savons, la philanthropie n’est pas insensible à l’économie. Elle se trouve en aval de la prospérité, de l’optimisme et des surplus. Lorsque ceux-ci disparaissent, les dons deviennent un produit de luxe inabordable. Observons-nous cette situation se concrétiser en temps réel?
On peut y voir une certaine symétrie poétique. La génération née dans l’abondance – les enfants du numérique qui ont accès à des réseaux mondiaux et à des outils auxquels leurs parents ne pouvaient que rêver – court maintenant le risque de devenir la génération la plus économiquement isolée de l’histoire canadienne. Son potentiel philanthropique est compromis avant même d’avoir la chance de se développer.
Et nous nous heurtons ici à un immense paradoxe : comment peut-on encourager les jeunes sans emploi, sous-employés, qui ont de la difficulté à payer leur épicerie ou le loyer, à faire des dons?
Cette situation est lourde de conséquences pour les organismes de bienfaisance canadiens. La diminution du nombre de donateurs, prédite depuis longtemps, pourrait s’accélérer, non pas en raison d’un manque d’intérêt, mais en raison d’un manque d’argent. La pyramide de dons classique est sur le point de s’effondrer, notamment parce qu’à son sommet se trouvent maintenant les baby-boomers vieillissants, au centre, la classe moyenne, et à sa base, une génération qui manque de ressources.
Nous devons faire face à cette réalité. Nous devons repenser les dons de bienfaisance classiques – pas comme une transaction financière, mais comme une pratique culturelle ancrée dans la communauté, le temps et la réciprocité. Nous devons également préconiser des politiques économiques, fiscales, d’emploi et d’immigration qui ne découragent pas la croissance et chercheront à revigorer les marchés et à soutenir tous les jeunes Canadiens.
Si nous ignorons les signaux d’alarme – si nous supposons que la prochaine génération fera des dons simplement parce que nous l’avons fait –, nous risquons d’assister au démantèlement de l’écosystème de la philanthropie, et donc de notre secteur social, non pas en raison d’un manque d’intérêt, mais en raison d’une exclusion économique systémique.
Cette situation pourrait avoir un effet boomerang pour ceux qui « ne pensent pas aux politiques fiscales »; peut-être pas pour eux personnellement, mais assurément pour les membres d’une génération qui ont de la difficulté à amorcer leur carrière, à fonder une famille et à commencer leur vie.
Les politiciens affirment souvent que « la situation nous concerne tous – nous sommes là pour vous (où, exactement?) – ou « nous sommes tous dans la même situation ».
Non, nous ne le sommes pas. (Et, vous ne l’êtes pas.)
Nous ne sommes pas tous dans la même situation! Nous traversons cependant tous la même tempête. Certains l’affrontent à bord d’un bateau robuste et solide équipé de gilets de sauvetage indexés à l’inflation, tandis que d’autres se trouvent dans un canot pneumatique bondé qui prend l’eau et qui dispose d’un moteur économique défectueux.
Cette tempête n’est plus imminente. Elle est en cours. Mais comme toutes les tempêtes, elle nous offre un choix : abandonner, battre en retraite ou s’adapter. Les sages s’adapteront – ils prendront du recul, examineront les nuages, vérifieront la provenance du vent et choisiront une nouvelle voie. C’est ici que les conseils stratégiques peuvent être utiles.
Cette nouvelle voie doit reposer sur une stratégie de collecte de fonds relationnelle et sur une solide démarche philanthropique. L’époque où nous pouvions compter sur les collectes de fonds transactionnelles, les approches traditionnelles, les sollicitations à froid et les recettes d’événements et le soutien du gouvernement tire à sa fin, si elle n’est pas déjà terminée.
Communiquez avec un professionnel de Global Philanthropic Canada pour discuter gratuitement de votre situation et de la façon dont une nouvelle démarche adaptative, une nouvelle culture de la philanthropie et une nouvelle approche relationnelle peuvent vous aider à traverser la tempête – peu importe la taille du bateau dans lequel vous vous trouvez.
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Lisez l’éloquent article de Jenna Benchetrit’s intitulé Gen Z is facing the worst youth unemployment rate in decades. Here is how it’s different | CBC News (en anglais seulement). L’auteur reconnaît s’être inspiré de Jenna Benchetrit (CBC). Les citations proviennent de Tricia Williams (Université métropolitaine de Toronto), de Charles St-Arnaud (Alberta Central) et de Miles Corak (Université de la ville de New York).